Le livre des soeurs d'Amélie Nothomb
Tous les ans, j’attends le dernier livre d’Amélie Nothomb. Cette année, j’étais impatiente de voir comment elle allait traiter des relations familiales et fraternelles dans Le livre des sœurs. J’étais d’autant plus curieuse que j’ai eu le plaisir de rencontrer à plusieurs reprises sa sœur Juliette qui exprime sans se cacher l’amour et l’admiration qu’elle voue à Amélie sa cadette. « La meilleure chose qui me soit arrivée » m’a-t-elle déjà dit. On sent qu’entre Juliette et Amélie, la relation est fusionnelle, au-delà de l’amour et de l’amitié.
Dans Le livre des sœurs, Amélie décrit cette relation fusionnelle entre deux sœurs, Tristane l’aînée et Laetitia, la cadette. Déjà avec les prénoms, l’ambiance est donnée : si Laetitia évoque la joie, la liesse, le bonheur, Tristane a un prénom qui commence avec le T de tristesse et de terne. Mais la joie de vivre dont fait preuve Laetitia, elle la doit à la terne et triste Tristane qui dès la naissance va entourer sa petite sœur d’un cocon d’amour et d’affection dont elle-même a toujours manqué et qu’elle sait nécessaire pour le bien-être de sa cadette. Car ces deux fillettes sont deux enfants abandonnées par leurs parents. Il ne s’agit pas d’un véritable abandon, leurs parents sont là mais ils sont tellement occupés à se regarder l’un l’autre qu’ils ne regardent plus dans la direction de leurs deux filles qui sont de trop dans leur vie amoureuse.
Amélie décrit sans complaisance des parents toxiques, une maltraitance psychologique au quotidien qui se manifeste non par de la violence physique ou verbale mais par de l’indifférence ou des mots au pouvoir négatif.
Un livre très dense, très riche, bref et incisif. Comme d’habitude dans les livres d’Amélie Nothomb, le style est ciselé, il n’y a pas un mot de trop, mais on sent que chaque mot est choisi avec soin. Mais pourtant Amélie ne fait pas dans la dentelle, c’est avec la précision d’un médecin légiste qu’elle dissèque les relations familiales, pointant les éléments toxiques d'une plume aussi acérée qu’un scalpel avec son humour caustique qui manie le second et le troisième degré pour décrire les drames qui jalonnent la vie de ces sœurs, du suicide raté au suicide réussi en passant par le suicide assisté maquillé en accident, l’anorexie, l’alcoolisme, et le tout sur fond de littérature et de musique rock.
Et puis cela se termine en happy end, malgré tout, parce que les mots ont le pouvoir qu’on leur donne et lorsqu’on le leur enlève, la malédiction cesse. L’amour des deux sœurs est plus fort que celui qui leur a donné naissance. Tristane et Laetitia se sauvent grâce à l’amour qu’elles se portent.
Bref, comme souvent avec Amélie Nothomb, je n'ai pas été déçue, c'était un bon moment de lecture et un livre que je relirai.
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